Regain de violences intercommunautaires en Centrafrique. "Le règlement de tout ça ne peut-être que politique, or la politique est en panne"

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Plus de 20 morts à Bambari, Jean-Yves Le Drian annule sa visite

PARIS/BANGUI, Reuters, 8 juillet 2014 - Le ministre français de la Défense a annulé mardi un déplacement prévu à Bambari au lendemain de nouvelles violences meurtrières entre chrétiens et musulmans dans cette ville du centre de la Centrafrique.

Jean-Yves Le Drian, arrivé lundi à Bangui pour une visite de 48 heures, a préféré annuler son déplacement à Bambari pour permettre aux forces françaises de se concentrer sur leur mission de protection de la population et de rétablissement de l'ordre, a-t-on indiqué dans son entourage.

Déjà théâtre fin juin d'affrontements qui avaient fait plusieurs dizaines de morts en deux jours, Bambari a connu une nouvelle journée de violences lundi avec une attaque de combattants musulmans de l'ex-Séléka et de groupes armés contre la cathédrale Saint-Joseph où étaient réfugiées plusieurs milliers de personnes, en majorité chrétiennes.

"Ce matin, nous avons dénombré 24 morts et 32 blessés", a dit Felix Ndarata, un responsable de la Croix-Rouge dans la ville. La plupart des victimes sont mortes sur le coup, les autres ont succombé à leurs blessures un peu plus tard à l'hôpital, a-t-il ajouté.

Les tensions entre communautés restent vives dans le pays plus d'un an après le coup d'Etat de la Séléka, à dominante musulmane, en mars 2013, qui avait été suivi d'exactions commises contre les civils, notamment chrétiens.

Cette vague de violences a entraîné l'émergence des "anti-balaka", des milices d'autodéfense majoritairement chrétiennes, qui s'en sont pris en retour aux populations musulmanes.

"La situation globale reste très complexe et très fragile", a souligné Jean-Yves Le Drian sur RMC mardi matin, de Bangui. "Il y a des éléments positifs (...) La situation à Bangui est relativement stabilisée grâce à la lucidité et au sang-froid de nos militaires dans une tâche extrêmement difficile qui vise à éviter des affrontements entre deux communautés".

DEUX OBJECTIFS ATTEINTS

Depuis le lancement de l'opération française Sangaris le 5 décembre dernier aux côtés de la force africaine Misca, deux objectifs sur trois ont été atteints, a estimé le ministre de la Défense: la pacification globale de la capitale, "c'est chose faite" et l'ouverture de la voie vers l'Ouest, qui est sur le point "d'être atteinte".

Le troisième objectif, la pacification de l'est du pays, peine pour l'heure à être atteint.

Quelque 2.000 soldats français sont actuellement déployés en Centrafrique aux côtés de 5.800 hommes de la force africaine Misca et de 700 soldats de la force européenne Eufor-RCA, qui compte 250 Français dans ses rangs.

Nommée en janvier, la présidente de transition Catherine Samba-Panza n'est pour l'heure pas encore parvenue à instaurer un dialogue entre les deux camps malgré ses appels à la réconciliation et au rétablissement du système judiciaire.

"Malheureusement elle est un peu isolée et essaie avec beaucoup de force de faire en sorte qu'un cessez-le-feu soit possible", a estimé Jean-Yves Le Drian qui a rencontré la présidente lundi.

L'"initiative de réconciliation" proposée récemment par des chefs des Etats de la région pour aboutir à un cessez-le-feu puis entamer un processus politique constitue un espoir, a ajouté le ministre.

"Cette rencontre devrait avoir lieu à Brazzaville (République du Congo) avant la fin du mois de juillet. Le gouvernement français porte beaucoup d'espoir sur cette réunion qui devrait permettre d'aboutir à une situation plus pacifique".

(Marion Douet et Marine Pennetier à Paris, avec Crispin Dembassa-Kette à Bangui)

 


 

Regain de violences intercommunautaires en Centrafrique

Le Monde.fr avec AFP |

Au moins 20 civils ont été tués en Centrafrique au cours d'une attaque lundi soir contre un camp de déplacés à Bambari, dans le centre du pays. Un regain de violences qui intervient alors que le ministre de la défense français, Jean-Yves Le Drian, en visite à Bangui, a souligné que « sans cessez-le-feu » ce pays « n'avait pas d'avenir ».

Les violences se sont déroulées « lundi soir dans le site des déplacés de la cathédrale catholique Saint-Joseph de Bambari ». L'attaque a été perpétrée « par des hommes armés portant des boubous et des uniformes militaires identifiés comme étant des ex-Séléka », a expliqué un membre de la force africaine (Misca).

 « NOUS NE FAISONS QUE DÉFENDRE LES POPULATIONS »

L'ex-rébellion estime que des miliciens anti-balaka, à dominante chrétienne, sont présents sur ce site de déplacés, comme ils le sont sur d'autres sites. « C'est pour cela que nous avons lancé une attaque », a indiqué un membre de leur état-major.

 « Il y a toujours des provocations et des attaques des anti-balaka depuis leur attaque contre des Peuls qui a fait 17 morts (le 23 juin, près de Bambari). Nous ne faisons que défendre les populations », s'est justifié Ahmad Nejad, porte-parole de l'état-major de l'ex-rébellion.

Ces nouvelles violences ont entraîné l'annulation du déplacement mardi à Bambari du ministre français de la défense. M. Le Drian est arrivé lundi à Bangui pour une visite de deux jours dans le pays, ancienne colonie française où la France est intervenue militairement en décembre pour tenter de mettre fin aux massacres.

SITUATION TOUJOURS TENDUE À L'EST

Dans une déclaration sur la radio centrafricaine mardi, il a déclaré qu'« il n'y a pas d'avenir pour la Centrafrique s'il n'y a pas de cessez-le-feu » entre les différents groupes armés qui s'affrontent et multiplient les exactions contre la population.

Le ministre s'était auparavant longuement entretenu avec la présidente centrafricaine, Catherine Samba Panza, lundi soir à Bangui.

 « Dans l'Est, la situation reste tendue », a rappelé le ministre français, soulignant qu'il faut éviter qu'il « y ait des affrontements entre des groupes qui ne recherchent que la haine et la vengeance ».

PLUSIEURS MILLIERS DE MORT DEPUIS DÉCEMBRE 2013

Jusque ces dernières semaines, Bambari était l'une des rares villes de Centrafrique à avoir échappé au cycle infernal des violences intercommunautaires.

La situation a changé brusquement lorsque l'ex-rébellion Séléka a décidé en mai d'y installer son nouvel état-major et une partie de ses combattants en vue de leur cantonnement.

Les incidents ont dès lors commencé à se multiplier malgré la présence des forces internationales, déclenchant fin juin une série de représailles et contre-représailles meurtrières qui ont fait des dizaines de tués.

Depuis le début des violences intercommunautaires à grande échelle en décembre 2013, la Centrafrique, qui compte près de 5 millions d'habitants, déplore plusieurs milliers de morts et plusieurs centaines de milliers de déplacés.

 


 

Le Drian en Centrafrique : "La solution ne sera que politique"

Le Point.fr - Par - le

 

Dans l'inextricable écheveau centrafricain, où 11 soldats français ont été blessés ces derniers jours, le ministre souhaite une accélération du processus politique.

La situation est toujours très instable en République centrafricaine, où le ministre de la Défense est arrivé lundi et doit rester jusqu'à mardi soir. Jean-Yves Le Drian a évoqué la situation ce mardi matin sur RMC, où il a estimé que la situation très instable demeure en attente d'un véritable processus de réconciliation, plus de six mois après le début de l'opération Sangaris. Celle-ci compte aujourd'hui 2 000 militaires français, auxquels s'ajoutent les 5 800 soldats de la force de l'Union africaine, la Misca. Une force dépêchée par l'Union européenne compte actuellement 700 hommes, dont 250 Français, qui ont atteint leur pleine capacité opérationnelle le 15 juin dernier. Son mandat court jusqu'à la mi-octobre 2014.

Le ministre français de la Défense s'est réjoui que les militaires français aient été en mesure de contribuer à une baisse de la tension, qu'il devait illustrer en personne ce mardi matin en participant à une patrouille dans les rues de Bangui : "Nous avons pu atteindre deux des trois objectifs que l'on s'était fixés. On a pacifié la situation à Bangui (la capitale), qui est relativement stabilisée grâce à la lucidité et au sang-froid de nos militaires. On a ouvert et sécurisé la voie vers l'Ouest, qui permet l'approvisionnement et le lien avec le Cameroun et les réseaux portuaires. La troisième mission, c'est faire en sorte que l'est du pays puisse se pacifier, c'est la mission de nos soldats."

De sérieuses tensions se sont faites jour, notamment dans la région de Bambari (centre du pays) où sept soldats français ont été blessés le 3 juillet, dans un contexte particulièrement complexe. Dans cette ville dont la population est majoritairement chrétienne (60 %), de vifs incidents ont éclaté lorsque des troupes de la Misca sont allées arrêter un chef milicien anti-balaka. Présents en soutien, les soldats français ont été visés par un jet de grenade qui a blessé sept hommes. Deux d'entre eux ont été évacués vers la France, sans que leur vie ne soit en danger. Lundi 7 juillet, de nouveaux incidents ont éclaté dans cette ville, avant que la tension retombe.

Arrivée progressive de l'ONU

Par ailleurs, des mouvements de foule, faisant suite là encore à l'arrestation d'un chef milicien, ont dégénéré le 7 juillet à Bangui et ont provoqué des blessures pour trois militaires français après un jet de grenade et d'un autre après un jet de pierre. Jean-Yves Le Drian devait se rendre dans la journée à leur chevet.

Lors de son intervention sur RMC il a ajouté : "Notre tâche, c'est de faire en sorte que la mission de l'ONU qui va s'organiser à partir du mois de septembre puisse se faire du mieux possible, pour que cette force se substitue progressivement à notre armée. En six mois, nous avons pu aboutir à un processus de pacification qui est en cours. Nous diminuerons notre format au fur et à mesure que l'ONU arrivera. D'ici la fin de l'année, nous pensons que le format pourra être diminué à partir du moment où la mission des Nations unies arrivera et s'implantera."

Le ministre français a rencontré lundi Catherine Panza-Panza, présidente de transition qui "essaie qu'un cessez-le-feu soit possible". Il a émis l'espoir que le processus de réconciliation se poursuive avec succès lors d'une rencontre des responsables africains qui doit se tenir fin juillet à Brazzaville, ajoutant que "la solution ne sera que politique". juillet

 


 

Centrafrique: Le Drian estime que le processus politique "est en panne"

Par AFP – lundi 7 juillet 2014

 

Jean-Yves Le Drian, qui entame lundi une nouvelle visite à Bangui, estime que le regain de tensions en Centrafrique est la conséquence du blocage du processus politique pour stabiliser le pays, actuellement "en panne".

 

"Le règlement de tout ça ne peut-être que politique, or la politique est en panne", a souligné le ministre de la Défense dans un entretien à l'AFP à la veille de son départ. L'arrivée en février de la présidente de transition Catherine Samba Panza "n'a pas permis la relance d'un processus politique qui est bloqué", a-t-il regretté.

 

Une dizaine de soldats français de la force Sangaris ont été blessés la semaine dernière lors d'accrochages avec des groupes armés. Les tensions entre communautés restent en particulier vives dans la région de Bambari, à l'est de Bangui, où de violents accrochages ont fait des dizaines de morts fin juin.

 

Selon M. Le Drian, l'absence de perspectives a conduit à la radicalisation de certains groupes "parce que l'on ne voit pas se tracer un avenir pour l'ensemble du pays". Mme Samba Panza a "beaucoup de bonne volonté, ce n'est pas elle qui est en cause, mais ça n'aboutit pas".

 

Face à cette impasse politique, Jean-Yves Le Drian a toutefois souligné comme "une pointe d'espoir" l'initiative des dirigeants des pays d'Afrique centrale réunis fin juin à Malabo (Guinée équatoriale), qui ont "convenu de la mise en oeuvre d'une conférence de réconciliation qui paraît indispensable pour qu'on sorte de la situation désastreuse actuelle".

 

Environ 2.000 militaires français sont toujours déployés en RCA dans le cadre de l'opération Sangaris, aux côtés de quelque 5.800 soldats de la force de l'Union africaine, la Misca, pour stopper les massacres inter-communautaires.